Il y a un an, j’ai lancé un challenge Braddon qui n’a de challenge que le nom, puisqu’il suffit de lire un roman de cette chère Mary Elizabeth d’ici la fin de l’année, et qu’il n’est pas obligatoire de s’inscrire à l’avance pour participer (en résumé : vous avez envie de lire un Braddon d’ici la fin de l’année ? Vous vous décidez en novembre et m’indiquez votre participation au moment de la publication de votre billet ? Voilà, vous avez participé au challenge !). J’avais envie de découvrir et de faire découvrir cet auteur victorien un peu oublié – voire totalement inconnu la plupart du temps.
Hier, sous le coup de ma fiévreuse passion pour Lady Audley (le livre, et non le personnage), je suis allée faire un tour en librairie, histoire de dénicher un Braddon susceptible de me rendre lui aussi insomniaque. N’en voyant pas, je demande à la libraire si par hasard ils en ont un, et on me répond « Mary Elizabeth Braddon ? Je ne vois pas… ah si ! » et, ajoute-t-elle avec une flexion du genou et un léger haussement d’épaules évoquant le sautillement, « les petites Anglaises, c’est ça ? ». J’ai sans doute dû avoir l’air un peu décontenancé, mais après coup, je me suis surtout dit que la libraire ne savait pas qu’aucune description ne pouvait plus mal convenir à Mary Elizabeth Braddon, à moins que les petites Anglaises qui sautillent en riant (et qu’on imagine bien en train de ricaner bêtement en secouant leurs boucles blondes et en plissant leur nez en trompette) permettent de se faire une idée précise d’une femme qui à l’époque victorienne où le puritanisme de façade était de mise, a décidé d’écrire un roman feuilleton sur une bigame qui cherche à tuer au moins un de ses époux, met le feu à un bâtiment habité et abandonne son enfant.
Autant vous le dire : si vous attendez du Secret de Lady Audley une construction de type classique, avec un coupable à démasquer à la fin, ce livre n’est pas pour vous. Dès les premiers chapitres, on sait que lady Audley est bigame et a vraisemblablement assassiné son premier mari, moins riche que le deuxième. (Aucun spoiler ici donc).
Plus que le roman policier, ce livre évoque le roman feuilleton « à sensation », avec ses rebondissements en fin de chapitre, ses effets d’annonce, son style parfois un peu emberlificoté et, à l’occasion, quelques oublis ou abandons d’une piste qu’on s’attendait à voir développer.
Mary Elizabeth Braddon n’est sans doute pas un très grand écrivain, mais elle excelle dans le roman populaire dont elle maîtrise tous les ressorts, qu’elle emploie sans modération. Vous aimez Dumas, Le Fanu, Wilkie Collins ? Vous devriez vous régaler avec cet auteur dont le roman phare m’a complètement emportée. Pour ma part, outre le fait que j’ai dévoré ce roman, ce qui montre déjà à quel point il m’a plu, j’ajouterais que Mary Elizabeth Braddon a su me surprendre, là où je n’attendais que des petits chamboulements. Le retournement de situation final me paraissait si peu crédible que je ne l’envisageais pas – j’imaginais plutôt un nouveau développement concernant Lady Audley. J’étais également étonnée de voir l’histoire se poursuivre après les aveux de la coupable, qui mettent en général un point final aux histoires de ce genre. Le tout dernier chapitre est un peu niais (imaginez Pride and Prejudice s’achevant sur un dernier chapitre « et ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. Lizzie faisait de la broderie pendant que Mr Darcy chassait. Ils voyaient souvent les Bingley qui avaient l’habitude de loger chez eux plusieurs mois chaque année »). Mais je chipote un peu, car ce roman à sensation remplit pleinement sa mission. Plus encore, il vient de créer chez moi une addiction à Miss Braddon. Rendez-vous au prochain numéro !
Voici ce que dit mon Oxford Companion to English literature: « The bigamous pretty blonde heroine (…) shocked Mrs Oliphant (que je veux lire depuis au moins un siècle) who credited Miss Braddon as the inventor of the fairhaired demon of modern fiction. (M.E. Bradon) was often attacked for corrupting young minds by making crime and violence attractive, but she won some notable admirers including Bulwer Lytton, Hardy, Stevenson and Thackeray).
Merci beaucoup à Hilde pour ce cadeau !
474 p
Mary Elizabeth Braddon, Le Secret de Lady Audley, 1862
CHALLENGE ELIZABETH BRADDON – les lectures :
Aurora Floyd : Cécile, Maggie, Mea
L’Aveu : Loula,
Henry Dunbar : Lou, Loula, Nag,
La Ferme Grise : Maggie,
Lady Isle : Cécile
Le Secret de Lady Audley : Cécile, Karine, Keisha, Lou, Malice, Mango, Titine,
Le Triomphe d’Eleanor : DViolante,
Les Oiseaux de Proie : Rachel,
Sur les Traces du Serpent : Choupynette,
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J’ai choisi ce billet pour le challenge « On veut de l’Héroïne » de Pickwick et d’Emma.
Je me suis dit qu’on attendait plus pour ce challenge des sortes de Cats Eyes ou autres héroïnes des temps modernes mais finalement je trouve que Lady Audley remplit très bien son rôle en la matière. Pourquoi Lady Audley est plus forte que Bella ?
– Au lieu de fantasmer sur un type mort dont le fond de teint excessif révèle des tendances psychopathes, elle épouse un type plus riche qu’elle et, pragmatique, quand l’occasion se présente, change de nom et épouse un type encore plus riche (qui avec un peu de chance décèdera rapidement vu qu’il est nettement plus âgé qu’elle).
– Au lieu de raconter des niaiseries et avec seulement trois ou quatre ans de plus que Bella, lady Audley est une femme d’action : elle tue son premier mari, commence à empoisonner le deuxième et met le feu à une auberge pour se débarrasser d’un ennemi. Pour une nunuche élevée à l’époque victorienne, c’est un sacré palmarès !
– Enfin parce qu’elle ne se drogue pas à l’héroïne mais n’hésite pas à prendre quelques gouttes d’opium à l’occasion.
Comme quoi, même les Victoriennes sont moins ringardes que Bella !
Commentaires
Écrit par : maggie | 16/09/2010
Écrit par : Manu | 16/09/2010
Écrit par : vilvirt | 16/09/2010
Écrit par : rachel | 17/09/2010
Écrit par : Lilly | 17/09/2010
Écrit par : Joelle | 17/09/2010
Écrit par : Titine | 17/09/2010
par contre j’ai « Le triomphe d’Eleanor » qui sera l’une de mes prochaines lectures
Écrit par : niki | 17/09/2010
Écrit par : keisha | 17/09/2010
Écrit par : choupynette | 17/09/2010
Écrit par : CecileSBlog | 17/09/2010
Écrit par : claudialucia ma librairie | 17/09/2010
Écrit par : dasola | 17/09/2010
Écrit par : Lilly | 18/09/2010
@ Manu : en tout cas tu peux profiter du challenge jusqu’en décembre, si ça te dit 😉
@ Vilvirt : bienvenue par ici ! Tu es toujours la bienvenue dans ce challenge, si tu es tentée par la lecture d’un autre titre d’ici fin décembre. J’irai voir ton billet asap !
@ Rachel : c’est vrai que c’est assez sulfureux pour l’époque. Je ne sais pas si tu te souviens de « Henry Dunbar » dont j’avais aussi parlé il y a pas mal de mois maintenant. C’était un peu le même principe, même s’il subsistait un très léger doute (ça se voyait gros comme une maison, mais ici c’est encore plus explicite, on nous dit qu’on sait que c’est elle, qu’on va la coincer…).
@ Lilly : j’ai eu un petit doute concernant « derrière le masque ». Je me suis dit « bizarre », elles ont écrit un livre du même titre ? J’espère que tu liras un Braddon en tout cas, je suis déjà très contente de voir que le challenge permet de découvrir de nouveaux titres.
@ Joëlle : mieux que dans la librairie dont je parlais (qui n’est pas énorme mais qui pourtant propose un bon choix de titres) ! Au plaisir de te lire alors 😉
@ Titine : je n’en ai plus mais j’en relirais bien un moi aussi ! On verra sur lequel je tombe en librairie… J’ai aussi lu mon Wharton, c’est la période des challenges anglo-saxons !
@ Niki : encore un titre qui me tente ! il faut dire que j’ai bien envie de lire tout Braddon, progressivement bien sûr comme elle a écrit environ 70 titres !
@ Keisha : je suis contente de voir que tu as aimé ! Dis-moi, est-ce que j’ai bien actualisé tes liens sur le challenge Woolf ?
@ Choupynette : j’ai vraiment beaucoup aimé « Henry Dunbar » ! Merci à toi pour ta participation !
@ Cécilesblog : oui je veux bien les liens s’il te plaît ! J’en ai retrouvés deux par hasard ce week-end, du coup je vais faire un billet récap pour demander aux participants de me rappeler tous leurs titres… j’ai peur d’en oublier !
@ Claudialucia : merci pour ton gentil mot ! N’hésite pas à participer, il suffit de m’indiquer ta participation quand tu publieras tes billets 😉
@ Dasola : j’avais lu une partie de l’affaire de Road Hill House, j’aimais beaucoup mais j’avais donné la priorité à d’autres lectures, ce que je regrette un peu comme il faudra sans doute que je reprenne ma lecture au début. J’espère que tu apprécieras aussi Braddon.
Écrit par : Lou | 20/09/2010
oh on se dit que cela ne peut pas etre si facile…surement…;o)
Écrit par : rachel | 20/09/2010
Écrit par : Lou | 22/09/2010
Écrit par : rachel | 23/09/2010
Écrit par : Lou | 25/09/2010
Écrit par : Céline | 01/10/2010
Écrit par : Lou | 02/10/2010
Écrit par : claudialucia ma librairie | 02/10/2010
Écrit par : Lou | 03/10/2010
Écrit par : CecileSBlog | 11/10/2010
Et tu viens de me donner envie de lire celui-ci également 😉 Je le note immédiatement dans ma LAL!
Écrit par : Sabbio | 28/10/2010
Écrit par : Sabbio | 28/10/2010
@ Sabbio : super, ravie de te compter parmi nous ! « La Ferme grise » me tente beaucoup aussi d’ailleurs !
Écrit par : Lou | 29/10/2010
Écrit par : Sabbio | 29/10/2010
Écrit par : Sabbio | 05/11/2010
Écrit par : Lou | 07/11/2010
Voici une nouvelle participation à ton challenge Braddon
Écrit par : Titine | 13/11/2010
Écrit par : Lou | 14/11/2010
Écrit par : caty | 11/04/2013
Écrit par : Lou | 14/04/2013
De beaux moments pour la saison 2 du Challenge British Mysteries. 🙂
Écrit par : Soie | 24/01/2014
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