Grâce à Lilly qui n’aime pas Barbara Pym et m’a gentiment offert son exemplaire d’Adam et Cassandra, j’ai passé un très bon roman au pays des vieilles filles, des pasteurs célibataires ou non, des veuves et des couples mal assortis. Le tout en Angleterre, of course !
Barbara Pym est souvent comparée à Jane Austen, dont elle serait la digne héritière. Cela me hérisse autant que lorsque je lis une comparaison similaire au sujet d’un roman iranien qui parle d’agences immobilières et de cuisine, ou encore lorsque les éditions de Jane Austen mettent en avant des critiques dignes de The Devil wears Prada, histoire de racoler le lecteur innocent (« tellement drôle », « hilarant », « la meilleure comédie jamais écrite », oui, je vous parle bien de Pride and Prejudice !). Pour en revenir à nos joyeux moutons, comparer Barbara Pym et Jane Austen est bien sûr chose possible, tout comme on peut comparer la carotte au chou-fleur. Ce sont deux légumes, qui peuvent se manger crus ou se déguster à la vapeur, en gratin, en soupe ou que sais-je ? On peut même les combiner dans une même recette, ce qui est beau, avouons-le ! De là à confondre la carotte et le chou-fleur, n’y a-t-il qu’un pas ? Eh bien pour quitter le plan horticole ou légumineux de mon illustration, Barbara Pym et Jane Austen ont elles aussi des points communs : un esprit plus ou moins critique, un ton plus ou moins ironique et moqueur ; une prédilection pour un milieu social qu’elles connaissent bien ; des intrigues de salon (mariage, héritage, bienséance, scandales vite étouffés et tués dans l’œuf) ; et justement, beaucoup de scènes cruciales au sein du foyer, où se nouent beaucoup de petits drames et triomphe la vie en société (avec tous ses commérages). Ajoutons leur nationalité et le fait qu’elles ne se sont jamais mariées, et voilà pour le rapprochement entre ces deux écrivains !
Pym est pour moi comme une petite grand-mère littéraire, dont l’ironie ne va jamais bien loin. Ce serait plutôt une charmante vieille dame au regard malicieux qui aime observer ses congénères et se moquer d’eux sur un ton finalement bienveillant. Les personnages pymiens sont souvent antipathiques car leur créatrice prend un malin plaisir à glisser innocemment quelques commentaires qui ne tardent pas à mettre en valeur les travers de chacun. Vanité, prétention, ennui, jalousie, voilà les petites faiblesses qui ponctuent tout le récit d’Adam et Cassandra. Adam est un auteur médiocre qui se prend trop au sérieux ; il est choyé par sa tendre épouse, une femme riche et belle qui aimerait parfois que son mari lui accorde un peu plus d’attention. Arrive un jour M. Tilos, Hongrois charmeur qui s’éprend de Cassandra et forme avec le couple un trio qui ne manque pas de faire jaser le voisinage. Malgré les petits rebondissements et les insinuations de Barbara Pym qui laissent entrevoir un minuscule ouragan dans la communauté bien établie d’Up Callow, le retour à la normale semble incontournable (du moins je n’en attendais pas moins après avoir lu deux autres Barbara Pym). Au final, j’ai passé un délicieux moment à savourer ce petit bonbon acidulé, me délectant des remarques amusantes et prenant plaisir à participer à quelques conversations de salon, sans parler d’un petit détour par la Hongrie. Pour en revenir à Jane Austen, il faut se défaire de cette idée d’un lien réel entre ces deux écritures pour aborder sereinement Barbara Pym. La prose de la première est bien plus fine et complexe lorsqu’on prend le temps de la lire attentivement. Les sujets ne sont pas les mêmes car plus d’un siècle sépare ces deux univers et, quoi qu’on en dise, la société a beaucoup évolué depuis le début du XIXe. Ce qui n’enlève pas à Barbara Pym son charme suranné et ses légers traits d’humour. L’état de ma PAL pymesque montre bien que je l’ai placée dans la catégorie suivante : A consommer sans modération !
Encore merci à toi Lilly pour ce roman qui m’a fait passer d’excellents moments le temps d’un week-end du 1er mai bien gris (parfaite excuse pour bouquiner) !
Sur ce blog, j’ai aussi parlé de : Des Femmes remarquables et de Crampton Hodnet (irrésistiblement drôle).
236 p
Barbara Pym, Adam et Cassandra, 1987 (posthume)
Commentaires
Écrit par : Aifelle | 15/05/2009
Mais tout comme toi je trouve que la comparaison avec Jane Austen n’est pas du tout appropriée.
Et je continue de conseiller de lire « Comme une gazelle apprivoisée », qui reste mon préféré de Barbara Pym !
Écrit par : Turquoise | 15/05/2009
Écrit par : Lilly | 15/05/2009
Tu me donnes encore plus envie de la relire, idéal quand on veut un peu de charme suranné et d’ironie…
Écrit par : keisha | 15/05/2009
Écrit par : Cécile de Quoide9 | 15/05/2009
Écrit par : wictoria | 15/05/2009
Écrit par : freude | 15/05/2009
@ Turquoise : je note le titre, même si je risque d’attendre un peu car j’ai cinq autres Pym dans ma PAL ^^
@ Lilly : tu veux que je te le prête ? :p Je te conseillerais peut-être plus « Crampton Hodnet » qui est le plus drôle, ce qui compense l’aspect « il-ne-se-passe-rien » qui t’énervait.
@ Keisha : j’ai celui-là dans ma PAL, j’ai hâte de lire ton billet. C’est énervant ces comparaisons à outrance ! Bientôt Helen Fielding sera considérée comme la digne héritière de Jane Austen (ce ne serait pas déjà le cas par hasard ?)…
@ Cécile de Quoide9 : non j’avais bien aimé mais ça ne m’avait pas empêchée de me moquer de l’histoire qui repose sur une vacuité amusante ^^
@ Wictoria : tu aimes Ogawa donc tu ne devrais pas être gênée par l’aspect contemplatif des livres de Pym… enfin ce n’est pas si contemplatif que ça mais on observe des petits rien et à la fin, la situation revient à peu près à celle qu’on avait au départ.
@ Freude : en fait je me rends compte que Pym est vraiment très appréciée alors qu’on la voit très peu sur les blogs… il est vrai que 10/18 l’a publiée il y a un petit bout de temps et que seuls quelques titres (dans une autre collection) se trouvent facilement aujourd’hui. C’est donc par hasard que j’ai découvert cet écrivain à un dîner livres échanges (sans doute ZE découverte aux dîners pour moi, puisque c’est la seule à avoir entraîné d’autres lectures du même auteur je crois).
Écrit par : Lou | 15/05/2009
Écrit par : Lilly | 15/05/2009
Écrit par : loula | 15/05/2009
Écrit par : Manu | 15/05/2009
Bref, je ne connais pas encore Barbara Pym, mais apparemment ça ne va pas durer !!!
Écrit par : Restling | 15/05/2009
Je note immédiatement Barbara Pym dans ma LAL, c’est typiquement le genre de livres qui peut me plaire !
Écrit par : Neph | 15/05/2009
Écrit par : rachel | 15/05/2009
Écrit par : Leiloona | 16/05/2009
Écrit par : Edelwe | 16/05/2009
Tu m’as donné envie de découvrir B. Pym, et ayant lu les extraits que tu as mis de « Crampton Hodnet », je pense sérieusement commencer par là, ce genre d’humour me conviendra normalement !
Mais maintenant, une grande question s’impose : Jane incarne la carotte, ou le chou-fleur ?
Écrit par : erzébeth | 16/05/2009
Écrit par : Rory | 16/05/2009
Écrit par : Karine 🙂 | 16/05/2009
Qui comme Ulysse / Georges Flipo
Qui touche à mon corps je le tue / Valentine Goby
Les maîtres de Glenmarkie / Jean-Pierre Ohl
La fausse veuve / Florence Ben Sadoun
Notre petite vie cernée de rêves / Barbara Wersba
Le chemin des sortilèges / Nathalie Rheims
Et le bébé était cuit à point / Mary Dollinger
Le secret de Noël / Anne Perry (10-18)
Une éducation libertine / Jean-Baptiste Del Amo
Des bibliothèques pleines de fantômes / Jacques Bonnet
Ailleurs / Julia Leigh
Y aurait-il autre chose paru en France entre août et octobre 2008 que tu aurais lu ? Si oui, je complèterai ma page consacrée au challenge. Merci de ton aide !
Écrit par : levraoueg | 16/05/2009
Écrit par : Lilibook | 16/05/2009
Moi! Mais ça marche, ça marche pas, ça marche, ça marche pas…
😉
Écrit par : sibylline | 17/05/2009
Écrit par : mango | 17/05/2009
@ Loula : le coup de l’épilation vaudou c’est franchement égoïste ;o)
@ Manu : sans doute parce que c’est vendeur… aussi parce que les éditeurs considèrent certainement que le lecteur lambda ne connaîtra que cette référence… dans tous les cas ça me semble injustifié !
@ Restling : j’étais dans un état d’esprit « légumivore », on dirait ! J’espère que tu apprécieras Barbara Pym.
@ Neph : eh bien je me pose aussi la question, j’ai beaucoup tourné et retourné le problème depuis quelques jours… et je trouve que le chou-fleur correspond particulièrement à l’esprit de tranquillité et à la sublime mise en pli de Madame Pym alors je dirais qu’Austen est, par défaut, la carotte :p
Écrit par : Lou | 18/05/2009
@ Leiloona : avec plaisir ! J’espère que tu l’aimeras quand tu auras l’occasion de la découvrir.
@ Edelwe : moi aussi j’adore, et pourtant il ne se passe pas grand-chose. Mais pourquoi aime-t-on autant la pluie, le froid et le thé anglais ?
@ Erzébeth : ta question métaphysique est tout à fait légitime ;o) J’ai « répondu dans ma réponse » à Neph… tadam, tagada tsoin tsoin… je te laisse remonter de quelques lignes pour un petit semblant minuscule de suspense ! (PS : « Crampton Hodnet » est de loin mon préféré)
@ Rory : tu fais bien, je pense que tu devrais aimer… et puis à part chez Lilly je crois que je n’ai vu que des coups de coeur pour Barbara Pym (moi ça a été un peu plus lent comme ma première lecture me plaisait pour l’ambiance, sans être non plus la révélation du siècle).
Écrit par : Lou | 18/05/2009
@ Levraoueg : connaître le chou-fleur et la carotte, c’est déjà un bon point de départ ;o) Qu’as-tu lu d’Austen ?
C’est vrai que j’avais vu passer le challenge du 1% mais je n’avais pas spécialement cherché à le faire comme, dès que je me fixe une contrainte littéraire, on dirait que je fais exprès de faire autre chose (sauf pour Jane Austen, je m’épate moi-même!). Je te remercie d’avoir pris le temps de faire cette liste, c’est super sympa !
Je vais regarder plus en détail mais il y a aussi :
– Stéphanie Mesnier, « Petits désordres au château » (sept 08)
– en réédition aux Allusifs (après édition épuisée Actes Sud), « L’Oblomova » de Tecia Werbowski (oct 08)
Je dois avoir acheté en VO des livres sortis en France à la rentrée littéraire, je te communiquerai les titres si je les lis à temps (j’espère). Merci encore à toi !!
Écrit par : Lou | 18/05/2009
@ Lilibook : je suis sans doute plus inspirée par mes chères Anglais(es) ^^
@ Sibylline : moi tout pareil ! Je ne comprends pas ! C’est pour ça que je cherchais un sorcier ou une sorcière aux résultats plus fiables :o)
@ Mango : j’espère continuer à dénicher toute ma vie des romans anglais de ce genre… j’ai peur d’avoir fait le tour au bout de quelques décennies !
Écrit par : Lou | 18/05/2009
Écrit par : Hambre | 18/05/2009
Écrit par : Lou | 18/05/2009
Sinon j’ai complété ma page du Challenge du 1% avec tes informations, sauf que je suis au regret de t’annoncer que je ne peux pas prendre en compte « Petits désordres au château » car d’après mes sources, il serait paru en novembre (or j’ai déjà supprimé de la liste de Fashion des parutions de novembre, car il paraît que la rentrée littéraire va d’août à octobre, il me faut donc être équitable (tu vois comme je prends mon rôle d’organisatrice au sérieux !)). Je t’invite donc à vérifier sur ton exemplaire. C’est important, car grâce aux 2 autres titres ajoutés tu en es à 13, or avec un de plus tu atteindrais les 2% ! Mais enfin 13 c’est déjà très bien !
Écrit par : levraoueg | 18/05/2009
Écrit par : Titine | 21/05/2009
Écrit par : Cécile de Quoide9 | 24/05/2009
Quant au challenge fait inconsciemment je t’ai répondu directement pour Stéphanie Mesnier ^^ ze ne me répète pas.
@ Titine : oui je te conseille ce livre qui est plus drôle car il ne se passe pas grand-chose chez Barbara Pym et le premier m’avait plu mais sans être un énorme coup de coeur, à cause de l’inertie et des psychologies moyennement développées pour un livre britannique de cette époque. Maintenant je serais plus généreuse, connaissant mieux Pym et sachant ce que j’aime chez elle.
@ Cécile de Quoide9 : je suis tout à fait d’accord sur le fait que le quotidien fait tout l’intérêt de son oeuvre, et qu’il s’agit de son sujet principal. Cela dit, par rapport à d’autres auteurs qui s’attaquent aux mêmes sujets, je trouvais ce roman plus mou, peut-être un peu monotone et léger. C’est une lecture que j’ai appréciée, comme c’est le genre de ton et d’ambiance que je recherche dans la littérature anglaise, mais « Des Femmes remarquables » ne m’a pas non plus laissé un souvenir impérissable. C’est le Pym que j’aime le moins pour l’instant, mais je le relirais sans doute avec plaisir.
Écrit par : Lou | 25/05/2009
Écrit par : Mango | 01/06/2009
Écrit par : Lou | 02/06/2009
Les commentaires sont fermés.