Alors que je n’avais pas lu beaucoup de livres sur le sujet – pour ne pas dire aucun, le prix Landerneau et l’opération du Livre de Poche m’ont amenée cet été à plonger à deux reprises dans le monde merveilleux des maisons de retraite. Sur les conseils de Malice (qui me l’a prêté), j’ai récemment lu La Femme Coquelicot de Noëlle Châtelet. Ce livre aborde la question encore assez taboue de l’amour chez les plus de 70 ans.
Retraitée, veuve, mère de deux enfants et grand-mère, Marthe mène une existence tranquille dans son appartement parisien. Entre thé et infusions – surtout pas de café, cachets et goûters en famille le dimanche, elle s’ennuie après des années de mariage tout aussi assommantes. Un après-midi, elle rencontre Félix dans le café où elle a ses habitudes. Ce vieux monsieur, « l’homme aux mille cache-col », savoure en la regardant un café, dans un moment poétique et sensuel qui marque le début d’une relation tendre et passionnée. Amoureuse pour la première fois, Marthe devient cette femme coquelicot qu’elle aurait pu être sans un mariage raté. Elle s’épanouit, multiplie les petites folies, aime et souffre comme une adolescente. Cette relation change son rapport à la vie : c’est cette évolution qui va servir de fil conducteur à l’histoire.
« Tout est semblable pourtant, mais avec un degré de plus.
Par exemple, elle met davantage de sel dans ses aliments, laisse se multiplier les rondelles de pain du petit déjeuner, règle à la hausse le son de la radio ou de la télévision. Elle veut amplifier les bruits. Voir éclater les couleurs. Même les objets usuels ont pris une autre épaisseur, une autre tangibilité. Marthe a besoin de sensations plus concrètes, de plus de proximité avec les choses et les gens. »
« Ce degré, cet échelon, gravi dans les sensations lui permet aussi d’éprouver certains faits de la quotidienneté comme des espèces d’événements. L’automatisme des gestes a fait place à quantité de petits ravissements. » (p15)
« Et Marthe veut brûler, comme avec Rossini et dans son flamboiement. » (p54)
« Et si c’était le désir qu’elle venait de rencontrer dans la rue, le désir coquelicot ? » (p77)
Le roman soulève avec naturel certaines questions comme la sexualité des personnes âgées ou le regard que leurs enfants portent sur elles. C’est aussi une jolie histoire d’amour écrite simplement, un texte assez court agréable à lire. La vieillesse est à mon avis abordée avec plus de spontanéité et moins de clichés que dans Nous vieillirons ensemble et Ces petites choses, deux lectures cependant très sympathiques. Plus centré sur l’intimité des personnages, La Femme Coquelicot apporte un regard dépouillé, sobre sur le sujet. Une lecture rafraîchissante, ce qui est plutôt signe de réussite vu le sujet, n’est-ce pas ?
Je venais à peine de finir cette lecture lorsque l’adaptation en téléfilm a été diffusée sur France 3. Les deux acteurs parviennent à rendre toute la sensibilité qui émane de leurs personnages mais le téléfilm est à mon avis assez navrant. A part les extraits d’opéra (également un thème récurrent du livre), la musique, déjà rare, est particulièrement mièvre. Quelques changements ont été opérés, ce qui n’apporte à mon avis rien à l’affaire, tandis que le réalisateur ne se réapproprie pas du tout le texte et se contente de transposer maladroitement à l’écran une histoire qui devient tout à fait soporifique. Un parfait téléfilm de grands-mères, réducteur à souhait !
152 p
Noëlle Châtelet, La Femme Coquelicot, 1997
Commentaires
Écrit par : Miss ALfie | 16/10/2008
Écrit par : Karine 🙂 | 16/10/2008
Écrit par : sylire | 16/10/2008
@ Karine:) : l’opéra ponctue leurs rencontres avec « le Barbier de Séville », au coeur de leur complicité. Sans être le thème central il revient à plusieurs reprises, en souvenir d’un de leurs premiers moments à deux.
@ Sylire : C’est vrai ? Je vais voir si elle en a parlé !
Écrit par : Lou | 16/10/2008
Il fait partie d’une trilogie : la dame en bleu et la petite fille aux tournesols.
Écrit par : anjelica | 17/10/2008
J’ai une admiration sans borne pour la plume de Noëlle Chatelet.
« La femme coquelicot » est le 1er volet d’une triologie: il faut absolument lire les tomes suivants. « La dame en bleu » et « La petite aux tournesols ».
Écrit par : Anne | 18/10/2008
Écrit par : Aifelle | 19/10/2008
Merci pour cette découverte, Lou.
Bises Taylor
Écrit par : taylor | 20/10/2008
@ Aifelle : je serais curieuse de voir ses interviews, merci de les signaler ! C’est à mon avis une lecture reposante, douce, qui n’est pas dénuée de charme.
@ Taylor : Ravie de t’avoir fait découvrir cet auteur… moi non plus je ne connaissais pas cet écrivain avant l’intervention de Malice ! ;o)
Écrit par : Lou | 20/10/2008
Écrit par : Thaïs | 22/10/2008
Écrit par : Lou | 23/10/2008
Écrit par : yueyin | 24/10/2008
Écrit par : Lou | 24/10/2008
Écrit par : XL | 15/12/2011
Écrit par : Lou | 15/12/2011
donc j’ai cherché les autres
très bien apprécié aussi la femme coquelicot
j’ai lu récemment le dernier âge : la petite fille aux tournesols et l’ai trouvé un peu moins bon
sinon je te conseille La tête en friches
Écrit par : XL | 16/12/2011
Écrit par : Lou | 17/12/2011
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