Le 24 février, j’ai assisté au musée d’Orsay avec Titine et Un Coin de Blog à une conférence sur l’influence de Shakespeare au XIXe. Voici un extrait de mes notes pour partager avec vous ce café littéraire très sympathique.
Shakespeare commence à être connu en France au XIXe à travers les traductions et les nombreuses adaptations. Il devient le porte-parole du Mouvement Romantique, une génération fascinée par le Barde. Ainsi Berlioz dit de lui : « Shakespeare me foudroya ». Freud (qui était très présent lors de ce café…) s’est quant à lui rendu deux fois en Angleterre, à 17 ans puis en 1908. Il est fasciné par le portrait de Shakespeare à la National Portrait Gallery et se questionne sur son identité, lui trouvant un air peu anglais.
Parmi les sujets de prédilection des peintres français au XIXe : Ophélie, dont on connaît davantage les représentations britanniques. Ci-dessous quelques exemples, mais je vous invite à lire l’article merveilleusement illustré Le personnage d’Ophélie à travers les arts.
Jules Joseph Lefebvre, Ophélie (1890)
Ernest Hebert, Ophélie (1876)
Alexandre Cabanel, Ophelia (1883)
Pascal Dagnan-Bouveret, Ophelia (1900)
Gustave Doré avait quant à lui prévu de dessiner tout Shakespeare, mais il est décédé avant de pouvoir mener son projet à bien.
Gustave Doré, Les Fées (1873)
Manet choisir quant à lui de peindre Hamlet. Il choisit d’abord pour modèle Philibert Rouvière, mais son tableau est refusé au Salon. Il peint alors Jean-Baptiste Faure en Hamlet. Cette fois-ci la toile est acceptée mais l’objet de vives critiques, on parle ainsi de « pantin désossé » à la « tête de tétard ». L’artiste ne trouve pas non plus la toile de Manet à son goût.
Edouard Manet, L’acteur tragique Rouvière dans le rôle d’Hamlet, (1866)
Edouard Manet, Jean-Baptiste Faure dans le rôle de Hamlet (1877)
Comme je le disais plus haut, Freud a été très largement cité lors de cette conférence. Il voyait en Shakespeare un maître et s’émerveille de certains traits de son oeuvre. Par exemple, lorsque Shakespeare joue volontairement sur l’utilisation de lapsus, cela prouve pour Freud que le poète savait que l’on s’interdit certaines choses. De même, Macbeth et son épouse représentent les deux faces d’un même personnage, une « double personnalité ». Freud ne comprend pas Lady Macbeth, qui meurt quand elle a tout ; il parle ainsi de « ceux qui échouent quand ils réussissent ». C’est la fameuse pièce écossaise qui porte malheur et dont on ne prononce le nom qu’à ses risques et périls.
La mort de Lady Macbeth a cependant peu inspiré les peintres : elle meurt off stage, on apprend sa mort par un discours rapporté. En revanche ses crises de somnambulisme fascinent. Le tableau de Delacroix marque Théophile Gautier, qui le juge « effroyable de vérité ». Je n’ai pas pu m’empêcher de le comparer ici à la version de Sargent, un de mes peintres favoris. Gustave Moreau tire de ce sujet deux versions inachevées, dans lesquelles Lady Macbeth est noyée dans des traces rouges évoquant le sang. Redon choisit le pastel, avec un personnage totalement rouge, aux grands yeux étonnants.
Eugène Delacroix, Lady Macbeth somnambule (1850)
John Singer Sargent, Ellen Terry as Lady MacBeth (1889)
Gustave Moreau, Lady MacBeth
Odilon Redon, Lady Macbeth (1898)
La peinture dite « shakesperienne » au XIXe ne se limite pas à la représentation des oeuvres de Shakespeare, il s’agit d’un véritable credo. Ainsi « Le Radeau de la Méduse » peut être considéré comme une oeuvre shakesperienne.
Jean Louis Théodore Géricault, Le Radeau de la Méduse (1819)
Ce café littéraire était dans l’ensemble instructif, bien qu’un peu inégal. Parmi les intervenants, nous avons toutes trouvé la jeune Delphine Gervais de Lafond tout à fait enthousiaste et pertinente. Elle est l’auteur d’une thèse sur « Shakespeare et les peintres du XIXe » et sa prestation nous a donné envie de lire sa thèse : de nombreuses références, un regard intéressant sur les oeuvres décrites… une intervention très enrichissante. Notre grande frustration concernait la littérature, absente à l’exception de Freud et de la psychanalyse – alors que nous espérions une approche bien différente. A noter enfin la présence de la comédienne Dominique Reymond, qui a lu des extraits de diverses pièces : une excellente idée de la part des organisateurs.
Une participation au challenge Shakespeare de Maggie et ClaudiaLucia.
Commentaires
oui, il faut lire un Shakespeare pour le mois anglais…
Écrit par : denis | 04/05/2013
Shakespeare sera incontournable en juin :o)
Écrit par : Lou | 04/05/2013
Écrit par : Shelbylee | 04/05/2013
Écrit par : Lou | 04/05/2013
en tout cas oui didonc quelle chouette conference…;)
Écrit par : rachel | 04/05/2013
A TOUS : des coquilles se sont glissées dans ce billet, qui persiste à apparaître sous une version brouillon malgré des modifications apportées hier à deux reprises. J’ai contacté l’hébergeur, je corrigerai ce soir pour la troisième fois si besoin est (même si j’espère que la bonne version apparaîtra en cours de journée). Et notamment je parle d’Odilon Redon et non Odile !
Écrit par : Lou | 04/05/2013
Écrit par : Mrs Figg | 04/05/2013
Écrit par : Titine | 04/05/2013
Écrit par : yueyin | 04/05/2013
On se rend bien compte que l’oeuvre de Shakespeare est absolument inépuisable, mais telle est la marque du génie. Et cela fait du bien de voir d’autres représentations d’Ophélie
que celle de Millais.
On peut enfin relire le poème » Ophélie » de Rimbaud….
Écrit par : UntexteUnjour | 04/05/2013
Écrit par : niki | 04/05/2013
Écrit par : rachel | 04/05/2013
@ Mrs Figg : j’ai découvert ça grâce à Delphine de Un Coin de Blog qui a la carte du musée… que j’ai décidé de prendre aussi du coup ! En ce moment il y avait une programmation de films très prometteuse mais je n’ai malheureusement pas pu y aller.
@ Titine : tu n’avais pas vu mais je parlais des coquilles plus haut dans mon message, j’ai eu le malheur de corriger mon billet après l’avoir mis en publication et hautetfort a buggé, ce qui fait que dès que j’actualisais c’était la première version avec Odile mais aussi des répétitions et des images trop grandes qui revenait… donc je viens de recréer un billet et de recopier tous les commentaires pour régler le problème une fois pour toutes !
@ Yueyin : et encore je n’ai pas réussi à noter tous les tableaux qui étaient cités :o) La partie littéraire nous a malheureusement beaucoup déçue !
@ UnTexteUnJour : avec grand plaisir :o) J’ai une préférence pour l’Ophélie de Millais mais effectivement j’étais moi aussi ravie de découvrir d’autres représentations.
@ Niki : de rien ;o)
@ Rachel : malheureusement cela n’a pas été développé plus précisément, du moins je n’arrive pas à me souvenir exactement des propos de l’intervenante :o( De mémoire cela avait trait à la scène en elle-même. J’aime beaucoup ce tableau aussi, même si ce n’est peut-être pas mon préféré !
Écrit par : Lou | 04/05/2013
Écrit par : rachel | 04/05/2013
Écrit par : Lou | 05/05/2013
Écrit par : rachel | 05/05/2013
Je viens de terminer le mystère d’Udolphe pour ton challenge (j’ai aimé!) mais je dois attendre le 27 mai pour le publier lors d’une LC.
Bonne semaine.
Écrit par : claudialucia ma librairie | 06/05/2013
Écrit par : FondantOchocolat | 06/05/2013
@ ClaudiaLucia : ravie de savoir que ce billet t’a plu :o) Enfin un billet sur Shakespeare alors que j’avais le projet d’en écrire beaucoup plus ! J’espère bien me rattraper…
Et super pour Udolphe, j’ai hâte de lire ta chronique ! Très bonne semaine à toi !
@ FondantoChocolat : et merci pour ton gentil mot :o)
Écrit par : Lou | 07/05/2013
Écrit par : rachel | 08/05/2013
Écrit par : Tiphanya | 16/05/2013
Je ne connaissais pas ces version d’Ophélie.. Celle de Hébert fait vraiment démente, j’aime!
Écrit par : purplevelvet | 17/05/2013
Écrit par : maggie | 19/05/2013
@ Tiphanya : Avec plaisir, je suis ravie d’avoir partagé mes quelques notes !
@ Purplevelvet : oh ça devait être passionnant ! J’adorerais assister plus souvent à ce genre de conférence ou voir des expositions sur ces thématiques et influences… je me suis déjà régalée avec les expos pré-raphaélites à Orsay (photo puis la deuxième plus « large »). J’adore aussi la version de Hébert, qui a un petit côté moyen-âgeux et merveilleux !
@ Maggie : mais si malheureusement Maggie c’était le sujet tel qu’il était annoncé mais la littérature s’est tristement résumée à la psychanalyse ! Une frustration pour ma part mais aussi pour celles qui m’accompagnaient !
Écrit par : Lou | 20/05/2013
Écrit par : rachel | 21/05/2013
Écrit par : Lou | 25/05/2013
Écrit par : rachel | 25/05/2013
Écrit par : Lou | 27/05/2013
Écrit par : rachel | 27/05/2013
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