Il y a des livres amusants. D’autres agaçants. Il y a des livres faciles à parcourir, des livres de détente, des livres dérangeants et bien d’autres encore. Et puis il y a les livres qui vous renversent, vous séduisent et vous troublent en vous laissant étonnés et ravis. Et mon cœur transparent fait partie de ceux-là.
Avant de poursuivre, voilà les quelques mots de Siri Hustvedt à propos du précédent roman de Véronique Ovaldé, Déloger l’Animal : « Déloger l’animal témoigne des talents d’écrivain de Véronique Ovaldé : drôle et triste, raffiné et brut, c’est un roman très singulier et pourtant universel ». Cette critique pour le moins curieuse est à mon avis diablement précise. Je pourrais presque m’arrêter là car elle décrit exactement ce que j’ai pu ressentir à la lecture de ce roman sélectionné dans le cadre du Prix Landerneau.
Et mon cœur transparent est l’histoire d’un curieux personnage au prénom non moins atypique de Lancelot. Ayant perdu tout récemment sa femme Irina, le héros s’aperçoit soudain des bases fragiles sur lesquelles reposait leur relation. Car de sa belle, l’amoureux transi ne sait rien ou presque. Et sa disparition semble également bien mystérieuse. Bientôt, les questions se bousculent et Lancelot tente de se reconstruire en découvrant Irina petit à petit, rassemblant chaque jour les pièces d’un étonnant puzzle.
Voilà un livre unique en son genre, audacieux et pétillant. L’écriture est originale, la ponctuation impertinente ; les majuscules remplacent les guillemets, les dialogues s’emboîtant joyeusement à la narration pour donner de l’élan au texte et nous permettre de nous immiscer avec délice dans les pensées du héros. L’univers de ce roman est surprenant : mêlant l’impossible au réel (Cathulu évoquait avec justesse L’écume des jours de Vian), ce roman-conte onirique est à la fois absurde et émouvant. Les meubles disparaissent comme par enchantement devant un Lancelot passif qui semble à peine perturbé par le monde vacillant qui l’entoure. La relation de couple est au cœur du récit, les personnages fantasques donnant une nouvelle dimension à un sujet classique, en particulier dans l’univers des polars auxquels ce roman emprunte quelques codes (pour mieux les transgresser).
Au final, un véritable enchantement : une lecture facile et un lecteur constamment sollicité, une histoire captivante, haletante et des qualités littéraires inattendues, un univers tenant parfois du rêve éveillé… ce livre réussit l’exploit en réconciliant avec brio de traditionnels opposés.
Je ne saurais trop remercier Elodie et les organisateurs du prix Landerneau de m’avoir permis de découvrir ce roman car sans eux, je serais très certainement passée à côté d’une incontestable révélation !
Prix du Livre France Culture-Télérama 2008
Editions de l’Olivier
233 p
Véronique Ovaldé, Et mon cœur transparent, 2008
Commentaires
Écrit par : Karine | 31/08/2008
Écrit par : fashion | 31/08/2008
Écrit par : Alice | 31/08/2008
Écrit par : Loïc | 31/08/2008
@ Fashion et Loïc : j’ai vu beaucoup de critiques négatives sur les blogs et je m’attendais à ne pas l’aimer. Ce qui est curieux c’est qu’habituellement quand un auteur prend trop de libertés avec la langue cela m’ennuie profondément, voire me rebute tout à fait. Cette fois-ci j’ai trouvé que Véronique Ovaldé jouait avec la langue, j’ai vraiment pris ce texte pour une histoire plutôt grave rendue désuète de par l’aspect ludique de l’écriture… un livre vraiment à part et donc plus susceptible de diviser… par contre, difficile de rester indifférent !
@ Alice : tout à fait, même s’il me reste encore « le temps d’une chute » à lire cette semaine… on ne sait jamais !
Écrit par : Lou | 01/09/2008
Écrit par : Cécile | 01/09/2008
c’est à se demander s’il n’y a pas des moments pour chaque livre…pourtant je l’ai lu pendant les vacances, j’étais détendue.
Écrit par : Thaïs | 01/09/2008
Et quelle ne fut pas ma déception en me plongeant dans le roman..et pourtant, je suis assez ouvert aux nouvelles expériences, aux nouveaux genres, mais là trop c’est trop.
Et puis après je lis des critiques comme celles de notre hôte et je me dis que soit je suis trop exigeant avec la littérature et donc ce livre était trop médiocre, soit c’est moi qui suis médiocre et je n’ai pas compris toute la subtilité de ce roman.
je ne sais.
Écrit par : Loïc | 01/09/2008
Écrit par : gaelleinbgk | 03/09/2008
@ Thaïs et Loïc : c’est assez amusant parce que j’ai d’abord lu des critiques dithyrambiques puis des avis en majorité très négatifs. Pas étonnant de voir que les avis les plus opposés suivent la lecture de ce drôle de roman qui est pour le moins dérangeant par son style particulier et son univers parfois ubuesque. A mon sens nos réactions différents ne viennent pas tellement du (bon) moment de lecture ou de notre bonne lecture (ou de l’existence d’un éventuel “bon lecteur”!) : c’est un livre si particulier qu’il peut déranger ou enthousiasmer, selon la sensibilité de chacun. Je suis moi-même parfois très difficile avec mes lectures, même si j’ai eu moins de mauvaises surprises récemment en écrémant plus souvent les livres qui risquaient de ne pas me plaire. Je comprends bien que ce livre a de quoi agacer et la plupart du temps je réagis assez mal aux libertés prises avec la grammaire et la ponctuation. Bizarrement, ici, la magie a opéré… sans doute parce que quels que soient les mérites d’un livre, la subjectivité joue toujours un grand rôle dans sa perception. Dans un autre registre, certains auteurs consacrés depuis longtemps enchanteront certains d’entre nous tandis que d’autres n’arriveront pas à comprendre d’où leur vient ce génie annoncé par tout le monde. Moi je dis : nous n’avons pas le même avis et tant mieux! Ce sont ces désaccords qui font la richesse des échanges entre lecteurs et donnent une image plus globale à ceux qui n’ont pas encore lu le livre incriminé!
@ Gaëlle : n’hésite pas à apporter ta pierre au débat en nous disant ce que tu en as pensé 🙂
Écrit par : Lou | 05/09/2008
Écrit par : Caro[line] | 08/09/2008
Écrit par : Lou | 10/09/2008
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