Londres, 1861. Grace se rend au cimetière de Brookwood à bord du train funéraire dédié, le Waterloo Necropolis. Sur les conseils d’une sage femme, elle vient glisser son enfant mort né dans le cercueil d’une riche défunte, n’ayant pas elle-même les moyens de lui offrir une sépulture. Il s’agit d’un enfant né d’un viol subi dans les locaux d’une institution de charité.
Grace fait alors la connaissance des Unwin, riches marchands de l’univers du deuil. Ce marché prend son essor à l’époque victorienne, entre les beaux cimetières à l’extérieur de Londres, les conditions strictes de deuil et de demi-deuil avec les toilettes spécifiques pour chaque occasion, sans parler des bijoux de deuil (faits avec les cheveux des chers disparus) et des photographies post-mortem, qui sont pour certaines les seuls clichés du défunt dont dispose la famille, en raison du coût élevé de la photographie à l’époque.
Grace est aussi responsable de sa soeur Lily, un peu simple d’esprit. Celle-ci a du mal à se débrouiller seule et leur cause des soucis en vendant pour trois sous un objet de valeur.
A la suite de divers déboires, les deux jeunes filles ne peuvent plus subvenir à leurs besoins. Grace accepte alors un poste chez les Unwin. Elle sera pleureuse professionnelle et, lorsqu’il n’y a pas d’enterrement, participera à la confection d’articles de deuil.
Elle découvre alors cette industrie prospère. Les Unwin sont obséquieux et bon commerciaux en présence des clients, malhonnêtes et grossiers dans l’intimité. Les bijoux de valeur des défunts sont volés lorsque les cercueils sont scellés et les matériaux utilisés ne sont pas toujours de la qualité promise lors de la vente. Les affaires florissantes des Unwin leur permettent de vivre dans les beaux quartiers, de faire grandir leur fille unique dans le luxe. Quant au frère de M. Unwin, il possède L’Empire du Deuil, proposant tenues, chaussures et accessoires de mode dans un cadre luxueux. Le patron est lui aussi un personnage assez répugnant qui inspire à Grace un malaise qu’elle n’arrive pas à expliquer.
Grace et sa soeur Lily vont se retrouver en parallèle au coeur d’une machination dont je ne vous dis pas plus pour ne pas vous ôter le plaisir de cette lecture.
Un roman agréable dont le principal intérêt tient en la qualité de la reconstitution historique. Une fois de plus, Mary Hooper s’est bien documentée sur la société qu’elle décrit et ici, le sujet précis du deuil à l’époque victorienne. Chaque chapitre est précédé d’un court texte d’introduction, dont on comprendra parfois la portée quelques chapitres plus tard : annonces commerciales, faire-part, épitaphes…
Pour ce qui est de la trame du roman, je suis un peu plus partagée, sans doute d’autant plus que j’ai lu des avis dithyrambiques sur ce livre. J’ai trouvé l’histoire plaisante mais terriblement prévisible. Les personnages sont manichéens et j’attendais la chute très tôt (ce qui n’est pas souvent le cas car j’aime me laisser porter par le récit sans forcément essayer de deviner ce qui m’attend). Les rebondissements étaient tellement classiques que le récit ne m’a finalement pas réservé beaucoup de surprises, ce qui tempère un peu mon enthousiasme. Néanmoins, l’impression globale est au final très positive mais encore une fois, elle est portée par le contexte historique bien retraduit et très intéressant.
A ce sujet, je vous renvoie vers l’avis plus positif de Pedro Pan Rabbit mais aussi vers son article sur un livre consacré aux photographies de défunts au XIXe, Beyond the Dark Veil.
Je vous invite aussi à lire cet article en anglais sur la compagnie qui gérait la ligne funéraire, avec quelques photos.
Enfin, mon billet sur un autre roman de Mary Hooper inspiré du spiritisme à l’époque victorienne, Velvet.
Présenté dans le cadre du rendez-vous du Mois anglais consacré aux Victoriens.
314 p
Mary Hooper, Waterloo Necropolis, 2010
Commentaires
Asie du Sud-Est, fin du XIXe siècle.
Le capitaine Tom MacWhirr commande le vapeur Nan-Shan, navire marchand construit trois ans auparavant, inscrit d’abord au registre britannique et battant maintenant pavillon du Siam (actuelle Thaïlande). En provenance du sud, le bateau vogue sur la mer de Chine en direction du port de Fou-Tchéou (Fuzhou), où il doit livrer son chargement et ramener deux cents coolies chinois de retour au pays après plusieurs années de travail dans diverses colonies tropicales. Mais voilà qu’une houle venant du détroit de Formose (Taïwan) se transforme implacablement en un gigantesque typhon, entravant ainsi le bon déroulement du voyage…
Cette nouvelle plaira sans nul doute à ceux qui aiment les combats de l’homme avec la nature. La description des éléments au fur et à mesure que le typhon approche, puis lors de son déchaînement, contribue évidemment au suspense de l’aventure : qui, des hommes d’équipage ou du typhon, sortira grand vainqueur de cette joute ?
Mais plus qu’une histoire de marins aux prises avec le ciel et l’océan, leurs caprices et leur puissance, c’est à mon avis une histoire d’êtres humains que Conrad offre au lecteur. Le commandant MacWhirr, son second Jukes, le chef mécanicien Salomon Rout, l’homme de barre Hackett, ou encore le premier lieutenant arrivé au débotté pour remplacer celui tombé malade avant le départ du navire, le « bosco » (maître d’équipage) à la force herculéenne, l’interprète chinois… : tous vont avoir leur rôle à jouer lors de la catastrophe annoncée – comme tous en ont habituellement un à tenir à bord. Chacun, selon son caractère, ses compétences, ses qualités, ses défauts, va lutter – ou pas. Chacun va se révéler aux autres, et peut-être à lui-même.
Pour moi, l’aventure révèle la solitude de chacun face à l’adversité exceptionnelle que représente le typhon. Parce qu’aucun des hommes à bord n’a manifestement connu auparavant un tel cataclysme, aucun ne sait avec certitude comment il va agir, réagir. Ce n’est qu’au fur et à mesure des événements – vent de plus en plus violent, océan de plus en plus agité, formation du typhon, oeil du cyclone… mais aussi ordres donnés, réactions constatées, incapacités d’agir – que chacun va donc affronter son ignorance. Et cette ignorance, selon moi, révèle à chaque homme à quel point il est seul. Seul et si dérisoire face aux éléments.
Alors s’ils veulent avoir une chance face au typhon, les hommes vont devoir – plus que jamais ! – être ce qu’on les appelle : un équipage. Soit le regroupent de toutes ces ignorances et ces solitudes, pour ne former qu’un.
Écrit par : Cory | 14/06/2017
Écrit par : rachel | 14/06/2017
Rôôô !!!… qu’elle est nouillasse, la fille (la fille, c’est moi).
Prenant le temps de me promener un peu et de lire tranquillement ton blog, je crois que je viens de trouver la solution au problème que je t’exposais le 12 (à lire dans les commentaires de ton billet du 09/06). Tadaaammm !
Je peux déposer mes contributions directement dans les commentaires de ton billet récapitulatif de ce mois anglais en date du 31 mai… isn’t it ??
Pfff !… je vais peut-être finir par devenir une pro des arcanes de la blogosphère…
Bonne journée !!
Écrit par : Cory | 14/06/2017
Écrit par : FondantGrignote | 14/06/2017
Écrit par : Mrs Figg | 14/06/2017
Écrit par : lilas | 15/06/2017
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Écrit par : Pedro | 30/07/2017