Autant en emporte…

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Drôle de roman que ce Combat de l’amour et de la faim dont le titre un peu abstrait n’aurait pas attiré mon attention sans les recommandations et l’enthousiasme débordant d’Ameleia et de Léthée.

Raconté à la première personne, ce récit s’attache au parcours de Marie, héros dont on ne sait rien si ce n’est que sa tête est mise à prix. Vol ? Meurtre ? Viol ? Certes non, mais son crime n’est pas moins répréhensible en ce début de XXe siècle aux Etats-Unis, dans un Vieux Sud pour le moins traditionaliste. Recherché pour avoir souillé l’honneur d’une femme, Marie s’interroge. D’April, de May ou de June, qui a choisi de le dénoncer ?

Difficile de résumer ce livre aux thématiques variées. Ce qui m’a frappée d’emblée, c’est la remarquable maîtrise dans la construction du récit. Des nombreuses péripéties ressort un texte dépouillé, sobre qui, à défaut d’être tout à fait linéaire, va droit au but. Et que dire de ces protagonistes variés qui marquent à la lecture, charismatiques malgré une intervention en général assez courte au sein du roman ?

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On ne peut que constater la formidable noirceur de ces personnages, dont on ne s’aperçoit peut-être pas immédiatement tant la poésie des premières scènes détourne l’attention. Enfant, frère et sœur, mère, amant ou maîtresse, employeur, comparse du moment : la trahison est omniprésente, sans doute guidée par un formidable instinct de survie, égoïsme imprévisible qui rattrape fatalement chacun au cours de cette histoire. Marie a d’ailleurs perdu ses illusions depuis longtemps ; abandonné par une mère trop heureuse de s’être mariée pour contrarier son pasteur d’époux, le narrateur a été chassé de leur nouvelle maison pour avoir violé sa demi-sœur. En réalité abusée par son propre frère, cette alliée des débuts s’est aussi détournée de lui.

hochet_vieux sud 02.jpgOutre l’aspect psychologique très bien développé et la narration qui ne s’essouffle pas un instant, le cadre est particulièrement soigné. Dans ce monde dur, impitoyable, il est sans doute plus facile de comprendre les motivations du héros et de son entourage mais plus encore, l’environnement ajoute à l’histoire personnelle une dimension historique et socio-culturelle passionnante. Soyons clairs : le sujet principal de ce roman n’est pas le Vieux Sud. Pourtant, quelques années après la Sécession, cet endroit reste fascinant et, sans alourdir le récit, Stéphanie Hochet a su y glisser d’ habiles allusions au contexte dans lequel Marie évolue. On retrouve une région splendide, sauvage mais dure, peu transformée par la Guerre de Sécession, fondamentalement raciste, sexiste, noyée sous les dogmes religieux et des codes moraux souvent discutables.

Un livre subtil, amis lecteurs, à ne certainement pas bouder !

Le quartier de La Nouvelle-Orléans où j’ai grandi avec ma mère est le sanctuaire de mes plus belles années. C’était il y a longtemps, mais, si je ferme les yeux, les détails de notre existence m’apparaissent avec netteté. Les rais de lumière prennent la forme de gigantesques élytres, apparitions phosphènes, souvenirs des insectes partageant les lieux avec nous. (p15)

Plusieurs critiques sur le site du Prix Orange (mais avant tout, les analyses très pertinentes de Léthée et d’Ameleia citées en début d’article).

Un grand grand merci à Adrien et Laëtitia des éditions Hachette pour cet envoi un peu spécial.

182 p

Stéphanie Hochet, Combat de l’amour et de la faim, 2009

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Commentaires

ça n’a pas l’air très gai quand même…pour le moment, je vais passer mon tour.

Écrit par : Edelwe | 30/05/2009

Je ne sais pas trop quoi penser par ce livre, certainement très bien. Mais je ne suis pas totalement convaincu. Et, si tu me le prête je pourrai faire ma propre opinion 😉

Écrit par : Alice | 30/05/2009

Je suis très tentée pour ma part. Le vieux Sud est un endroit que je commence à apprécier, et cette lecture a l’air intense.

Écrit par : Lilly | 30/05/2009

oui didonc le titre n’attire pas du tout…mais cela a l’air fort comme livre…oh…

Écrit par : rachel | 30/05/2009

ton avis donne envie de le découvrir

Écrit par : pom’ | 31/05/2009

Je passe mon tour pour le moment. Cette famille ressemble fort à celle de Dallas. 😀

Écrit par : Leiloona | 31/05/2009

Je ne dis pas non à ce titre, il peut être intéressant.

Écrit par : Lilibook | 31/05/2009

J’ai hâte de connaître le/la lauréat(e) du prix Orange

Écrit par : Cécile de Quoide9 | 31/05/2009

Trop sombre apparemment pour moi en ce moment! Je préfère continuer mes lectures de Barbara Pym! (tes choux et carottes!)

Écrit par : Mango | 01/06/2009

@ Edelwe : ce n’est pas si sombre que ça en a l’air en fait… j’espère qu’il te tentera un jour, c’est un livre qui vaut le détour.

@ Alice : avec plaisir, pas de souci ! Je ne sais pas si tu aimeras mais c’est un livre très riche et très sérieusement construit en tout cas !

@ Lilly : curieusement il y a beaucoup de simplicité dans le déroulement de l’histoire comme dans le style, mais il y a matière à creuser ! Pour le vieux Sud je l’associe à certains auteurs et il m’a toujours fascinée… et pourtant je le connais encore trop peu ! Ce livre m’a donné envie de le retrouver.

@ Rachel : le titre devient très logique à la lecture du roman et surtout, d’un certain passage symbolique qui reprend les mêmes termes, mais je dois avouer que j’aurais a priori pensé à des histoires qui n’ont rien à voir (histoire d’une enfance pauvre à la Swarup peut-être ? Il s’agit bien d’une enfance dans la pauvreté mais aussi dans la joie, du moins en partie… puis les sujets deviennent nombreux).

@ Pom’ : cela vaut le coup !

@ Leiloona : Really ?? Je dois avouer que je ne connais pas franchement la série, je serais un peu plus au courant s’il s’agissait de « Santa Barbara » ou des « Feux de l’Amour », mais c’est un domaine que je maîtrise moyennement ^^

@ Lilibook : il l’est ;o)

@ Cécile de Quoide9 : je ne connaissais pas du tout ce prix à vrai dire… mais si tous les titres sont comme celui-ci, je vais m’y intéresser !

@ Mango : Pym c’est sympa aussi !

Écrit par : Lou | 02/06/2009

oh cela m’a juste fait penser a un « bon » livre de cartland…;o)

Écrit par : rachel | 02/06/2009

@ Rachel : ça existe, ça ?!:o)

Écrit par : Lou | 02/06/2009

Rien à voir: j’ai fait le test (pas le clear blue, l’autre!) et je suis Elinor Dashwood ;P

Écrit par : choupynette | 02/06/2009

Je serais passée à coté aussi, mais après avoir lu ton avis, je vais tout de même jeter un coup d’oeil à ce livre.

Écrit par : liliba | 02/06/2009

euh je ne peux pas savoir…jamais lu…lol!

Écrit par : rachel | 03/06/2009

Pourquoi pas .. malgré la noirceur du sujet, çà a l’air d’être un livre profond et complexe, je le note.

Écrit par : Aifelle | 03/06/2009

Intrigant, en effet, et tu cites des blogueuses…
Bon, si je le vois!

Écrit par : keisha | 03/06/2009

Ca semble un roman fort mais je ne suis pas certaine que ce ne soit pour moi… je vais y réfléchir, donc!

Écrit par : Karine 🙂 | 03/06/2009

C’est un article formidable, Lou, Bravo. Vous avez vu toutes les facettes du roman notamment l’aspect psycho social que je n’avais pas vu du tout à l’origine. C’est effectivement impressionnant de constater que sur un roman court on puisse trouver une telle densité dans l’articulation de l’intrigue, du contexte et des thèmes. Je pense qu’il faut rester attentif à l’évolution de cette oeuvre qui se dévoile progressivement et s’accomplit dans la lenteur.
Pour la comprendre je ne saurais que trop conseiller « Apocalypse selon Embrun » sans doute le « fondateur » et surtout à mon avis, consciemment ou inconsciemment le plus sincère de S. Hochet.

Écrit par : ameleia | 03/06/2009

Bravo pour ce bel article ! Oui, comme le dit Ameleia, lis Embrun ! Pour ma part, je pense me diriger maintenant vers le Néant de Léon. 🙂

Écrit par : Léthée | 03/06/2009

@ Choupynette : serait-on aussi au courant du résultat de l’autre ?;o)

@ Liliba : ça me ferait très plaisir de le voir un peu plus sur les blogs, il mérite d’être remarqué.

@ Rachel : j’en ai lu un au collège, c’est le livre le plus drôle que j’aie jamais lu !

@ Aifelle : à la lecture, l’impression de noirceur ou de sordide n’est pas si importante. Le texte se lit avec plaisir, il parait presque léger… ce n’est qu’en s’interrogeant un peu que l’on voit cet aspect mais il ne « plombe » pas le récit.

@ Keisha : Léthée et Ameleia ont des blogs très intéressants et travaillent aussi pour le Magazine des Livres. Je te recommande d’aller faire un tour chez elles !

@ Karine:) : j’espère que tu te laisseras tenter, eh oui…

Écrit par : Lou | 04/06/2009

haha je suis mdr…ce n’est pas le but de ce genre de livre…;o)…

Écrit par : rachel | 04/06/2009

@ Ameleia et Léthée : merci encore à vous deux qui m’avez donné envie de lire Stéphanie Hochet ! Je note le titre que vous me conseillez immédiatement !

Écrit par : Lou | 04/06/2009

@ Rachel : vraiment ? Oh bah zut… je n’ai rien compris du tout à l’histoire de cette nana qui s’enfuit de chez elle avec sa robe encombrante pour se retrouver dans une caverne où va la protéger un certain John ou Philip ou je ne sais plus qui :o)

Écrit par : Lou | 04/06/2009

C’est le genre de roman que je trouve fascinant. L’imbrication de différents thèmes, l’étude social,… Dur certes, mais je note!

Écrit par : chiffonnette | 07/06/2009

@ Chiffonnette : je suis contente de voir que plusieurs d’entre vous sont tentés par ce joli livre !

Écrit par : Lou | 15/06/2009

chapeau bas une fois encore pour le nombre sidérant de commentateurs que vous attirez !
amitiés.

Écrit par : ameleia@sfr.fr | 15/06/2009

@ Ameleia : j’espère surtout que mon billet permettra à quelques lecteurs de découvrir, et surtout de lire Stéphanie Hochet.
Je vous souhaite une jolie journée, d’autant plus qu’il va sans doute faire beau ici.

Écrit par : Lou | 16/06/2009

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