Gwenaële Robert, Sous les Feux d’artifice

Gwendaële Robert fait incontestablement partie de ces auteurs que je compte retrouver régulièrement, depuis que j’ai découvert ses romans historiques, que ce soit à destination d’un public adulte (Never mind) ou enfant (Miss Dashwood, Rose et Suzon – avec deux chroniques en retard de ce côté-là, mais j’espère bien en reparler rapidement).

Dans ce nouveau roman, elle explore des évènements historiques peu connus, néanmoins fascinants. 1864. La guerre de Sécession fait rage. En France, l’exposition universelle se prépare. Les ouvrières textiles, elles, sont touchées de plein fouet par l’arrêt de l’approvisionnement en coton lié à la guerre. Officiellement neutre, en réalité pro-sudiste, Napoléon III cherche une manière d’accéder de nouveau au coton et à contrer l’influence américaine.

Il décide d’envoyer au Mexique Maximilien et Charlotte de Habsbourg, dès lors nommés empereur et impératrice de ce pays qu’ils n’ont jamais vu. Nous suivons leur traversée de l’Atlantique, l’arrivée au Mexique et la désillusion lorsque Charlotte comprend que le pays lui est hostile et qu’ils ne sont que des pions sacrifiés sur l’échiquier politique mondial. Maximilien, lui, est trop occupé par la chasse aux insectes et l’observation des plantes pour réaliser l’ampleur du défi qui les attend.

En parallèle, l’Alabama mouille au port de Cherbourg ; il s’agit d’un navire de guerre sudiste auquel les eaux américaines sont interdites. Alors que la ville s’apprête à ouvrir son casino et à accueillir une première fournée de Parisiens par le train de nuit fraîchement mis en place, un autre navire arrive. Cette fois-ci, il est mené par les yankees et provoque l’Alabama, dont le capitaine devra accepter de combattre s’il veut espérer quitter la rade.

Dans ce contexte, Théodore Coupet, journaliste mondain venu couvrir l’ouverture du casino rencontre Mathilde des Ramures, une aristocrate ruinée dont le mari est parti se battre au Mexique. Mathilde demande de l’aide au journaliste qu’elle a déjà croisé, expliquant qu’elle n’a plus un sou pour payer la dot de sa fille Palmyre. Une situation qui leur donne l’idée d’organiser un pari sur l’issue du combat entre les deux navires américains, car Théodore Coupet est persuadé de connaître le futur vainqueur, qui n’est pourtant pas le grand favori.

Un roman passionnant qui mêle la petite histoire à la grande et nous fait découvrir comment la guerre de Sécession est parvenue jusqu’aux côtes françaises, dans un contexte géopolitique international savamment restitué. Gwenaële Robert parvient à présenter les enjeux stratégiques et économiques croisés de plusieurs pays, à expliquer comment des Habsbourg ont pu atterrir au Mexique, pourquoi la guerre de Sécession impactait notre industrie et comment la France, pays des droits de l’Homme, se positionnait face à l’esclavage et à la problématique des champs de coton.

On croise à la fois une aristocrate désargentée, des royaux européens trop mal placés pour espérer régner un jour et prêts à accepter n’importe quel titre de pacotille, des bourgeois tantôt ambitieux, tantôt oisifs, des pêcheurs et d’anciennes ouvrières espérant se faire un peu d’argent avec la naumachie qui se prépare. Le récit culmine avec cette bataille transformée en jour de fête, où chacun cherche le meilleur point de vue et déguste un pique-nique bien mérité pendant que les marins tirent des obus sur l’ennemi en attendant de savoir quel navire coulera, avec son lot de noyés. Parfois touchant, parfois révoltant, le texte saisit l’ambiance toute particulière de ces jours d’effervescence et d’angoisse, des deux côtés de l’océan. Le tout porté par la plume toujours aussi élégante de Gwenaële Robert. Un excellent cru de cette rentrée littéraire.

Deux autres titres à découvrir par ici :

Gwenaële Robert, Never Mind

Gwenaële Barussaud, Rose et Suzon T1, Le plus bel hôtel du monde

252 p

Gwenaële Robert, Sous les feux d’artifice, 2022

2 thoughts on “Gwenaële Robert, Sous les Feux d’artifice

  1. Bonsoir, de Gwenaële Robert, j’avais beaucoup aimé Le dernier bain (sur l’assassinat de Marat). Je ne savais pas qu’elle en avait écrit d’autres. Je note celui-ci. Bonne soirée.

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