Luc Chomarat, Le polar de l’été

Quand au détour d’une virée dans une librairie du quartier Saint Germain, pleine de souvenirs de mes années d’étudiante, je suis tombée sur ce titre, j’ai eu le sentiment de trouver le livre parfait pour l’été. Et je dois bien avouer que j’ai quelque chose en commun avec le héros (ou plutôt, l’anti-héros) : mon rapport aux livres est parfois un peu sommaire quant il s’agit de (dé)-sélectionner un titre à sa couverture. Évidemment, je ne m’arrête pas à une jolie photo lorsqu’il s’agit de faire mon choix, mais il est indéniable que certains livres m’attirent comme des aimants et d’autres sont rejetés instantanément. Il m’arrive d’attendre une sortie en poche en espérant une couverture plus réussie ou de choisir entre français et anglais sur cette base-là.

Toujours est-il que j’ai découvert que Le polar de l’été était déjà sorti sous d’autres atours moins estivaux, avec une pin-up faisant allusion à certains polars de l’enfance du narrateur, et à son goût pour les jolies femmes. Je ne l’aurais probablement jamais considéré si je l’avais croisé à ce moment-là. D’ailleurs, qui me dit que je ne l’ai pas désélectionné en librairie ? Bref, cette fois-ci, le joli effet central sur cette photo familiale sentant bon les embruns et les après-midis d’été, les critiques positives et la promesse d’un séjour littéraire à l’Ile de Ré ont vite eu raison de moi.

Après cette énorme digression qui en dit long sur mes préoccupations estivales, passons au sujet du roman !

Le narrateur s’est fait virer d’un boulot dans la pub. Il profite de la vie en dilapidant tranquillement son compte en banque, fait quelques missions occasionnelles histoire de renflouer les caisses et a à son actif un polar du genre hard-boiled, langage fleuri et scènes de sexe à l’appui. Le voilà à l’Ile de Ré avec sa compagne, leur fils et les enfants qu’ils ont eus ensemble ou d’unions précédentes. Ils louent une maison de vacances avec une amie, elle aussi venue avec ses enfants. Les deux familles sont accompagnées d’une jeune fille au pair, Zara. D’elle, on sait qu’elle surveille efficacement les nombreux enfants, a des vêtements minimalistes pour sa poitrine très généreuse et porte un regard peu indulgent sur le roman publié par son employeur.

Celui-ci rêve d’écrire le best seller de l’été et, ne se sentant aucun talent pour les feel good et la chick lit, il réfléchit au fameux polar de l’été. D’ailleurs, sa compagne enchaîne les lectures de best-sellers pendant leurs vacances, une source de frustration constante pour lui.  Il repense à un roman de la bibliothèque paternelle, roman oublié qui pourrait, il le sent, lui servir de source d’inspiration. Car il ne parvient pas à trouver d’idée pour son roman commercial. En parallèle, alors qu’il profite de vacances en mode sea, sex and sun, son frère l’informe que leur mère s’est blessée au genou et l’enjoint de se rendre séance tenante à Saint-Etienne. Le comble de l’horreur pour celui qui est devenu la caricature du crétin parisien méprisant.

Ce roman très ancré dans la société contemporaine avec ses avantages et ses travers navigue entre plaisirs du quotidien, recherche de réussite sociale et nostalgie de l’enfance.

Le souvenir de la bibliothèque paternelle sert de fil conducteur à cette histoire mettant en avant un héros un peu paumé, assez insipide, aux aspirations bassement matérielles. Malgré son caractère volontairement antipathique, cet écrivain raté ne manque pas d’humour, parfois ridicule. En cherchant la gloire et l’argent, il va revenir sur son passé… même si au final, c’est un paumé qui tourne un peu en rond et dont on ne sait pas tout à fait ce qu’il retirera de son odyssée estivale. Ce roman n’est pas vraiment un polar, mais c’est un titre qui sent bon l’été et qui a une résonance toute contemporaine, au-delà de l’influence évidente du roman noir. Cela sonne vrai, c’est simple mais en même temps, très réaliste, cynique et assez drôle. On passe un bon moment et on se laisse facilement happer – j’ai lu les 130 dernières pages d’affilée.

203 p

Luc Chomarat, Le polar de l’été, 2020

4 thoughts on “Luc Chomarat, Le polar de l’été

  1. Dis donc, tu sais attirer le lecteur 😉 Je suis un peu curieuse d’en lire plus. Comme toi je me laisse parfois (souvent ^^) influencer par les couvertures des livres… J’essaye de résister mais je dois avouer que j’y réussi assez mal ^^

  2. Je fonctionne aussi comme ça avec les couvertures de livres, difficile de résister malgré plein de stratégies élaborées en amont! En tout cas, les différents visuels sont surprenants! Ils ont bien fait de le rééditer! J’aurais peut-être craqué, ça semble sympa à lire.

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