Once bitten, twice damned

king-salem's lot.jpgAdolescente, j’ai découvert avec horreur et délectation la littérature d’épouvante. Avec Hilde et une autre amie, nous lisions avec avidité les romans de Stephen King ou d’Anne Rice, plus ou moins en même temps, inventions des personnages inspirés de ces récits et savourions ensemble ces lectures d’un genre nouveau. J’ai assez rapidement cessé de lire Stephen King et l’ai abandonné pendant des années… à vrai dire je ne l’avais jamais relu depuis le lycée. Je ne suis pas attirée par ses derniers livres, en revanche depuis quelques années j’envisage de lire ou relire ses « classiques », qui me paraissent plus sérieux, moins commerciaux.

J’ai donc choisi pour cette lecture commune Salem’s Lot, qui traîne depuis un certain temps dans ma bibliothèque. Ce roman me tentait dans la mesure où il traitait du mythe du vampire, qui m’intéresse beaucoup… et curieusement, je n’arrivais jamais à me mettre à le lire : il me tombait des mains au bout de quelques pages et j’étais persuadée (je ne sais pas pourquoi) que le vampire n’était évoqué que de façon métaphorique. Je me suis donc fait violence, car l’introduction me déplaît toujours autant. Un homme et un petit garçon se sont réfugiés dans un coin perdu… une ombre plane sur leurs vies, car ils ont vécu ou connaissent quelque chose de terrible, mamma mia !… et l’on revient sur ce qui leur est arrivé. Et là, le récit devient très intéressant. Cette introduction est vraiment courte, pourtant elle a bien failli me faire déclarer forfait : j’ai lu trente pages avant de partir en Grèce, ai abandonné King pour Virginia Woolf et c’est uniquement parce que j’anticipais mon retour à Paris et le manque de temps que j’ai repris ma lecture pendant mes derniers jours libres. C’est donc sur une plage catalane que je me suis plongée dans les premiers chapitres d’un roman que je qualifierais finalement de très intéressant.

Salem’s Lot (Jerusalem’s Lot à l’origine) est une paisible petite ville américaine sans intérêt, où il ne se passe jamais rien. L’une des premières scènes marque la rencontre entre Ben Mears, écrivain de retour dans cette ville après de nombreuses années (et une tragédie personnelle), et Susan Norton, jeune femme un brin artiste désabusée par la vie à Salem’s Lot.

Au début du roman, le lecteur apprend l’existence de Marsten House : située un peu hauteur, cette maison qui domine la ville est abandonnée depuis des années, depuis que son propriétaire s’est pendu après avoir abattu sa femme. Ben se souvient d’être entré dans la maison par défi lorsqu’il était enfant et pense avoir vu le cadavre grotesque de Hubbie Marsten le regarder, toujours suspendu à sa corde. C’est en partie pour exorciser ce mauvais souvenir que Mears est revenu écrire un roman inspiré de la maison en question. Bizarrement, alors qu’il envisageait de la louer, il apprend qu’elle vient d’être achetée par deux antiquaires souhaitant monter leur affaire à Salem.

Rapidement après l’arrivée de Mears, deux enfants se font attaquer dans la forêt alors qu’ils empruntaient à la nuit tombée un raccourci pour se rendre chez un camarade. Le plus petit a disparu tandis que le deuxième, choqué, décède peu de temps après.

Le roman emprunte ensuite les principaux codes du récit de vampire : un à un, puis de plus en plus rapidement, les victimes semblent souffrir d’anémie et décèdent, avant de se réveiller après le crépuscule. Ces vampires dépendent de leur maître, leur « père originel », dont je ne vous parlerai pas plus car il faut bien que vous découvriez vous-mêmes ce roman. Les armes sont on ne peut plus traditionnelles : aïl, croix, eau bénite, prières et bénédictions, « stake through the heart » et j’en passe !

Je ne voudrais pas dévoiler tous les ressorts d’un tel classique fantastique (au passage, c’est le deuxième roman publié par Stephen King après l’excellent Carrie). Le récit est dense, les personnages multiples et leurs histoires croisées tissent petit à petit une trame cohérente, assez classique. A vrai dire, le roman est assez long : on pourrait résumer très rapidement les principaux événements, mais il faut compter avec de nombreuses scènes intermédiaires qui permettent au lecteur de suivre le quotidien inintéressant puis de plus en plus étrange des habitants. Or c’est justement cela qui permet à King de mettre en place une atmosphère très particulière, assez lourde, dérangeante qui, lorsque la tension monte à son comble, finit par devenir assez effrayante. La première scène de vampire dans un cimetière est très angoissante d’ailleurs ! Salem’s Lot est pour moi un roman réussi, très bien mené, qui tient le lecteur en haleine de bout en bout… ou presque, car les toutes dernières pages me paraissent à peu près aussi fascinantes que les premières. Si l’écriture n’est pas « esthétique », le style parvient à parfaitement retraduire l’état d’esprit des personnages et la menace qui plane sur eux (un style à mon avis parfaitement approprié au but que s’est fixé l’auteur, et en aucun cas maladroit). Un roman qui par ailleurs n’est pas inintéressant sur le plan sociologique, car King excelle lorsqu’il s’agit de décrire la classe moyenne américaine lambda.

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483 p

Stephen King, Salem’s Lot, 1975

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Commentaires

En lisant ton billet, j’ai réalisé que j’avais oublié plusieurs détails de l’histoire mais je n’ai pas oublié le plaisir que j’ai eu en le lisant. C’est un de mes King préféré ! Je suis heureuse que tu aies aimé aussi.

Écrit par : Marguerite | 22/10/2011

@ Marguerite : c’est aussi un de mes préférés, même si c’est difficile de comparer avec des livres lu il y a très longtemps 🙂 Parmi les autres il y aurait « Carrie » et « Rage » aussi… mais bon j’ai aimé à peu près tout ce que j’ai lu… par contre ado j’avais le don de lire uniquement le premier volume de ses romans, comme « Le Fléau » ou « Les Tommyknockers », j’ai lu le 1er tome à chaque fois !

Écrit par : Lou | 22/10/2011

Moi aussi j’ai lu beaucoup de S. King ado et vu nombre de ses films Malheureusement comme tu le rappelles dans ton billet, il écrit vraiment trop mal et son écriture est carrément un cauchemar à lui tout seul !
J’ai voulu regarder la série filmique (tout ce qui porte le nom de salem m’attire irrésistiblement !!!) mais ca avait l’air tellement daté et mal vieilli que je n’ai pas dépassé les premières images…. Pour compenser et pour le challenge, je suis en train de relire le Bram Stoker : je l’adoore et c’est un vrai plaisir de le retrouver même si je suis toujours dans mes classiques poussiéreux que tout le monde a déjà lu : désolée pour celles qui sont allergiques aux acariens !!!

Écrit par : maggie | 22/10/2011

Je l’ai relu l’année dernière, c’est mon King préféré. Il faudrait peut-être le faire lire à toutes les ados qui rêvent d’Edward Cullen, être un vampire chez King est beaucoup, beaucoup moins glamour!

Écrit par : Glorifine | 22/10/2011

Je l’ai adoré celui là… Je crois que c’est mon préféré de Stephen King… Mais ça fait vraiment longtemps que je l’ai lu… Dommage que l’on n’ai pas plus de temps pour les relectures !!

Écrit par : L’or des chambres | 22/10/2011

Je l’ai bien lu quand j’étais au lycée celui-là (d’après mon cahier de lecture) mais je n’en garde qu’un vague souvenir, chose assez étonnante car les romans de Stephen King ont plutôt tendance à laisser leur empreinte sur moi, avec leurs atmosphères oppressantes et inoubliables.
Après notre découverte du King, j’ai continué à lire ses romans, un de temps en temps, et puis je prends parfois le temps de relire, quand j’en ai l’occasion ou vraiment envie.

Écrit par : Hilde | 23/10/2011

Même chose pour moi, celui-ci n’est pas celui qui m’a le plus marqué. Je me souviens à peine de l’histoire. Peut-être que je devrais le relire !… Mais l’idée des LC autour de cet auteur est une super initiative ! Je cours lire les billets de tout le monde !

Écrit par : vilvirt | 23/10/2011

Je l’ai récemment lu et j’ai adoré! Je replonge en ce moment dans l’univers de Stephen King…
C’est vrai qu’il faut un peu s’accrocher au début…
Je me suis demandée aussi si le bouquin traitait vraiment des vampires…mais une fois que l’invasion commence, rien ne l’arrête!

Écrit par : Gaëlle | 23/10/2011

@ Maggie : en fait pour l’écriture je n’ai pas dû être très claire ce n’est pas tellement ça que je voulais dire. Ce n’est pas une belle écriture, recherchée, stylisée, élégante, mais elle n’est pas non plus dérangeante dans ce roman. Elle est factuelle et retraduit bien l’ambiance et les pensées des personnages. C’est assez efficace d’un certain point de vue. Après je ne l’ai pas relu en français et je ne sais pas si après la traduction le style empire ou non. J’aimerais bien voir l’adaptation même si ça date… en fait il y a même deux adaptations. Quant à « Dracula » c’est une pure merveille, tu as raison de le relire !

@ Glorifine : oui et il s’inspire largement de Stoker et des autres classiques (Polidori etc)… à l’époque le vampire était moins sexy, mais toujours sensuel à sa façon puisque dans la plupart de ces romans on trouve des victimes consentantes, prenant plaisir une fois la morsure passée.

@ L’Or des chambres : je relis de temps en temps (je relisais beaucoup petite mais très peu maintenant)… souvent j’oublie presque entièrement ce que j’ai lu donc quand je sais que j’ai aimé dans le fond ça ne me dérange pas de relire.

@ Hilde : je ne sais pas où j’ai mis mon carnet de lecture de l’époque mais j’en ai un depuis quelques années où je note mes lectures… même si je n’ai pas été très assidue cette année et me retrouve avec des mois vides… impossible de me souvenir de ce que j’ai lu à ce moment ! Tu as lu beaucoup plus de King que moi et en plus tu lis beaucoup plus vite, c’était déjà le cas à l’époque :o) Je me rappelle de nos aprems ensemble d’un jour à l’autre tu avais lu la moitié d’un King ou d’un Rice… en tout cas je vais continuer à lire cet auteur.

@ Vilvirt : on a eu cette envie pendant le challenge, difficile de faire un challenge Halloween sans penser à Stephen King :o) Je me suis régalée hier en lisant plusieurs billets !

Écrit par : Lou | 23/10/2011

Je me rappelle encore les moments où je le lisais : sous les couvertures, le soir, avec ma lampe torche et en VO (parce qu’à l’époque, il n’avait pas encore été traduit en français) et je devais avoir 13 ans … ce doit être pour ça que c’est une lecture dont je garde un excellent souvenir 😉

Écrit par : Joelle | 24/10/2011

@ Joëlle : à cet âge-là je lisais assez peu en anglais, j’ai mis plus de temps que toi à me décider même si j’adorais déjà cette langue :o) Moi aussi j’ai des souvenirs particuliers de mes lectures de Stephen King, une découverte du collège entre copines !

Écrit par : Lou | 24/10/2011

Je n’ai jamais lu Stephen King, et à chaque fois, quand je lis des billets sur ses livres, je me dis qu’il faut vraiment que je m’y mette…

Écrit par : Lilly | 25/10/2011

@ Lilly : je te le prêterai avec plaisir si tu veux… je serais vraiment très curieuse de connaître ton avis miss !

Écrit par : Lou | 27/10/2011

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