Waubgeshig Rice, La Lune de l’Âpre Neige

Je me suis lancée cette année dans la lecture des cinq titres proposés par la librairie Lilosimages dans le cadre son prix Lilojury. Je ne suis pas vraiment en avance puisque les délibérations auront lieu le 2 décembre et que j’ai terminé deux romans sur 5. Des trois autres en lice, j’avais d’abord commencé « Un Pays de Fantômes » que je lis très doucement, mais m’étant aperçue de l’approche de la deadline, j’ai entamé « Les Filles bleues de l’été » en fin de semaine et « Aleftheria » avant-hier. Ces deux derniers me plaisent beaucoup, il me reste à mettre à profit toutes mes soirées pour les terminer à temps. Je reprendrai ensuite « Un Pays de Fantômes » pour terminer.

Ma deuxième lecture dans le cadre du prix a été « La Lune de L’Âpre Neige » de Waubgeshig Rice. Je n’aurais probablement jamais découvert ce roman toute seule. Le titre est très poétique, mais la couverture ne me plaisait pas vraiment et il s’agit d’un roman postapocalyptique, un genre qui ne m’attire pas non plus. Mais c’est justement aussi pour sortir un peu de mes inclinations naturelles que j’ai eu envie de participer à ce prix. J’aime beaucoup les sélections proposées par Lilosimages, j’y ai découvert de petites pépites et apprécie beaucoup de maisons d’édition indépendantes qui y sont mises en avant. Énorme digression à part, de quoi parle ce roman ?

Nord du Canada, dans une réserve indienne, certains se préparent aux rigueurs de l’hiver en chassant et préparant des provisions.

Alors que les jours deviennent plus courts et que le froid s’installe, une panne d’électricité se produit. La communauté réussit à mettre en place une solution de secours temporaire. Mais il apparaît rapidement que la panne est plus grave qu’il n’y paraît. Les téléphones et la télévision ne fonctionnent plus. Le magasin est dévalisé par des gens inquiets. Et deux étudiants reviennent en motoneige, expliquant que la panne d’électricité s’est aussi produite dans les grandes villes où les gens sont en panique et perdent les pédales. Le conseil de la tribu met donc en place des mesures pour survivre à l’hiver. Peu de temps après arrive un homme blanc dont on sent qu’il risque de jouer les fauteurs de troubles.

Un roman à lire tout d’abord pour tout ce qu’il nous fait découvrir des Anichinabés et de ce qu’ils ont dû subir. La communauté vit dans des préfabriqués. Certains tentent de transmettre comme ils le peuvent les traditions anichinabées, en grande partie perdues par l’acculturation forcée. On leur a retiré leurs terres, on a éduqué leurs enfants en les forçant à perdre la langue et la culture de leur peuple. On les a parqués dans des réserves situées sur des territoires ingrats, difficiles à exploiter et situés tout au nord du pays. Quand j’étais ado, je suis allée au Colorado et j’ai découvert des campements jonchés d’ordure où vivait une communauté indienne. Lire ce titre m’a beaucoup fait repenser à cette scène. C’est une lecture salutaire qui dénonce un état de faits honteux, et qui démontre la grande richesse de la culture qu’on a cherché à anéantir.

La fin du monde occidental met en question ce renoncement au mode de vie traditionnel des anichinabés, dont beaucoup ne sont plus du tout armés pour faire face à une situation pareille. Et quand les mois passant, on comprend que le retour à la vie occidentalisée n’est plus possible, se dessine une autre alternative, qui passe par la réappropriation de la culture ancestrale et, entre autres, une meilleure connexion à la nature.

Si ce roman n’est pas un coup de cœur, le fond est très intéressant. Le suspense est là, les personnages et le cadre m’ont donné envie de découvrir quelle pourrait être la chute de ce récit aux débuts pessimistes, ce qui n’est pas rien pour moi qui ne suis pas très attirée par les histoires de fin du monde.

291 p

Waubgeshig Rice, La Lune de l’Âpre Neige, 2018 (2022 pour la VF)

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